COMMENT QUANTIFIER LE BINÔME PROGRAMME-UTILISATEUR ?

La télévision mobile ouvre le champ à de nouvelles méthodes de mesure de l’audience et de rémunération des annonceurs. Outil essentiel et enjeu pour toute la profession publicitaire car ces données dictent les tarifs des espaces (détermination du « juste prix »). Ce calcul reposera sur une solution hybride entre mesure de téléphonie mobile, de télévision mobile et d’Internet mobile. Elle comprendra :

  • Une approche exhaustive, par le traitement automatique des connexions des utilisateurs (aux guides de programmes, aux applications, à l’Internet mobile ou à la mise en marche du terminal). L’annonceur paie de plus en plus le contact utile, à savoir celui qui mène au clic sur son site Internet mobile, une manière qui se confirme par le choix de la firme Google, en acquérant au prix de 503 M€ en action la société AdMob [1]. Il en est de même des objectifs des bourses d’échanges ou plateformes publicitaires iAd d’Apple [2], du rachat d’Enpocket par Nokia et des accords stratégiques des filiales de Publicis (Phonevalley et Microsoft Mobile Advertising, Vivaki et Google). Tous visant à créer des solutions sur-mesure pour les annonceurs présents sur l’Internet mobile.
  • Une approche par panel, pour donner le temps de consommation et le profil des utilisateurs. C’est la méthode traditionnellement utilisé pour la télévision par le Médiamat [3] depuis le 2 janvier 1989 et le MédiaCabSat depuis le 28 août 2001.

C’est en multipliant et en croisant ce type d’investigations que les études mercatiques de ce nouveau média seront pertinentes et précises.

Tableau explicatif des données à acquérir :

D’un point de vue applicatif, le géomarketing désigne la mise en cartographie des informations. Il génère des cartes et permet les analyses statistiques de l’espace cartographié. Son but est de révéler et mesure l’incidence de la localisation sur l’activité de consommation.

Les études transmises par les opérateurs de communication (SFR et Orange), au sein de la société de multiplexe, pourraient être déterminante dans la compréhension des flux et des consommations des utilisateurs de la publicité géo-ciblée sur la télévision mobile. Ces derniers disposent en effet de la « voie retour » et du recueil d’informations spatiales au niveau de l’individu (ciblage géographique par zone de couverture des antennes de télécommunication). Ces informations peuvent aussi être agrégé et permettre de réaliser des cartographies de groupes, afin d’obtenir une nouvelle visualisation de l’espace physique. Cette compréhension serait à rapprocher avec les zones de chalandises des enseignes. Le projet « Urban Mod » de FaberNovel, menée en partenariat avec Orange Labs, en est un exemple. Il s’agit de visualiser l’activité des populations urbaines au travers de leur utilisation du téléphone mobile.

Représentation de la quantité de services de messageries SMS envoyés lors de la fête de la musique du 21 juin 2008, FaberNovel – Orange Labs. La forte activité de l’Ouest parisien est due au concert de Tokio Hotel au Parc des Princes et d’un concert organisé par France 2 à l’hippodrome d’Auteuil.

Représentation de la quantité de services de messageries SMS envoyés lors de la fête de la musique du 21 juin 2008, FaberNovel – Orange Labs. La forte activité de l’Ouest parisien est due au concert de Tokio Hotel au Parc des Princes et d’un concert organisé par France 2 à l’hippodrome d’Auteuil.

Représentation des flux de déplacement de personnes lors du match de football France-Italie du 9 juillet 2006, projet Real Time Rome, Seansable City Lab, M.I.T.

Représentation des flux de déplacement de personnes lors du match de football France-Italie du 9 juillet 2006, projet Real Time Rome, Seansable City Lab, M.I.T.

Représentation des flux de déplacement de personnes lors du concert de Madonna au Stade olympique le 6 août 2006, projet Real Time Rome, Seansable City Lab, M.I.T.

Représentation des flux de déplacement de personnes lors du concert de Madonna au Stade olympique le 6 août 2006, projet Real Time Rome, Seansable City Lab, M.I.T.

Représentation de l’application Citysense. Cette application préfigure un type d’usage des données spatio-temporelles agrégées. Elle propose une cartographie des activités urbaines basée sur l’activité Wifi des téléphones mobiles et des GPS équipant les taxis, et sur laquelle sont ajoutées des informations concernant les activités culturelles. Cette représentation dynamique donne aux utilisateurs un moyen de connaître et de choisir un endroit où sortir le soir, en repérant les lieux les plus animés.

Représentation de l’application Citysense. Cette application préfigure un type d’usage des données spatio-temporelles agrégées. Elle propose une cartographie des activités urbaines basée sur l’activité Wifi des téléphones mobiles et des GPS équipant les taxis, et sur laquelle sont ajoutées des informations concernant les activités culturelles. Cette représentation dynamique donne aux utilisateurs un moyen de connaître et de choisir un endroit où sortir le soir, en repérant les lieux les plus animés.

Ces données géo-ciblées issues de la téléphonie mobile sont potentiellement un outil d’aide à la décision. Puisqu’il est possible de caractériser certains lieux, notamment les plus fréquenté, et propice à une visualisation de messages publicitaires ciblés.

Actuellement, trois sociétés se préfigurent pour le rôle d’une approche par panel :

Pour Médiamétrie, la télévision mobile va bouleverser les conventions de mesure d’audience. Actuellement, celles-ci ne concernent qu’un « public âgé de plus de 4 ans, demeurant en résidence principale, en ménage ordinaire, regardant la télévision sur poste fixe ». Le téléphone mobile était donc hors champ de la mesure. Afin d’anticiper l’arrivée de ce nouvel usage, Médiamétrie a pris un tournant en consacrant 15 % de son budget à la recherche[4] et en gagnant l’appel d’offre de l’AFMM [5].

Pour ce faire, elle s’est lancée dans quatre dynamiques de recherche :

  • Un premier partenariat technique conclu avec Expway, porte sur le système FastCollection qui permet d’étudier la navigation de l’EPG (Guide électronique des programmes), véritable passerelle d’accès aux contenus [6].
  • Un second partenariat est annoncé avec Gemalto qui a mis au point une solution intégrée aux cartes Sim (élimine l’étape complexe d’intégration de logiciels dans le terminal client). Par utilisation de la voie de retour, la carte SIM fournit une approche d’audimétrie portable [7].
  • Un troisième partenariat entre Médiamétrie et la division télécommunications de Nielsen, signé en juin 2009, revendique de devenir la mesure des usages et comportements de consommation en matière de téléphonie mobile (service, produits, médias et contenus).
  • Enfin, Médiamétrie a lancé en juin 2009, « Mobile Consumer Insight ». Un baromètre trimestriel, produit en commun avec Nielsen Telecom Practice, qui fournira un panorama complet et l’analyse détaillée des usages et comportements de consommation en matière de téléphonie mobile [8]. « eStat-Streaming », filiale de Médiamétrie eStat, quant à elle étudiera les contenus mis en lignes par les utilisateurs [9].

La société TNS Worldpanel, filiale du groupe Taylor Nelson, pige depuis 1969 l’ensemble des investissements publicitaires des cinq grands médias en France : La presse, la télévision (chaînes hertziennes et thématiques), la radio, l’affichage et le cinéma. Depuis 2002, Secodip a intégré le média Internet et Internet mobile à sa pige pluri media à partir des données déclaratives des régies publicitaires (base de données « AdScope », version évoluée de « Scanpub »). Elle dispose également d’outils de détection automatique spécialisée dans les flux d’images. Le logiciel « Sportsi » en autre, arrive à repérer tous logos publicitaires dans une vidéo.

La société Yacast pige quant à elle depuis 2002, les investissements publicitaires de la télévision. Très présente sur le média Internet, elle s’est associée à Dailymotion [10] pour fonder « Muzicast Web », un service de mesure d’audience qui certifie un classement cohérent des clips visionnées (les plus vues, les meilleurs progressions, les plus marqués « tags », les plus commentées, les plus « virulentes » grâce aux « Deep links », c’est-à-dire les liens renvoyant sur la vidéo). Elle intégrera des fonctions de reconnaissance vocale et d’image dans l’algorithme de recherche, tel qu’on voit les prémisses sur des sites comme Blinkx, Videosurf et Everyzing [11]. Un logiciel de ce type pourrait voir le jour sur les terminaux mobiles.

Ces deux approches, l’une exhaustive, l’autre par panel, rendent possible l’émergence d’une nouvelle forme de cartographie et d’analyse de la réalité. Il permet de rendre visible les flux des individus et de déterminer par croisement. Quantifier ainsi le binôme programme-utilisateur permettra de pouvoir d’affiner des publicités géo-localisées des points ou l’impact serait le plus fort.


Notes :

[1] Les annonceurs peuvent créer des campagnes graphiques ciblées par mots clés ou par zone géographique et facturées au coût par clic (CPC). Pour les recherches incluant un élément géographique, Google classe les réponses sur une carte. Les entreprises référencées le sont gratuitement, mais d’autres paient pour y figurer. Extrait de l’article « La transformation spectaculaire du monde de la publicité et des annonceurs oblige à repenser les métiers classiques », quotidien Le Nouvel Économiste, 2 avril 2009. Anthony RAVAU, directeur de l’agence My Media, estime ainsi que « Google va devenir de plus en plus un concurrent de Médiamétrie », propos tenu dans la revue Stratégies, n° 1487, 7 février 2008, p. 36.

[2] Apple avait renforcé sa position en janvier 2010 en acquérant la régie Quattro Wireless pour 194 M€. Le calcul d’Apple est simple : si chaque utilisateur d’iPhone ou d’iPad se voit proposer une publicité iAd toutes les trois minutes (sur les trente qu’il utilise son terminal par jour en moyenne), c’est plus d’un milliards de publicités qui seront ainsi distribuées quotidiennement. Qui plus est de façon ciblée, et même localisée. Extrait de l’article « Apple passe à l’offensive dans la publicité sur mobile », quotidien Les Échos, 15 avril 2010.

[3] Le Médiamat est la mesure de référence de l’audience de la télévision en France. Il s’appuie sur un Panel de 9 675 individus âgés de 4 ans et plus vivant dans 3 894 foyers équipés d’un audimètre à bouton-poussoir. Ce panel est représentatif des ménages résidant en France métropolitaine et possédant la télévision dans leur résidence principale. Les résultats d’audience des chaînes comprennent les modes de réception de la télévision par le public en hertzien analogique et numérique (TNT), par câble analogique ou numérique, ainsi que par satellite et ADSL. Le recueil de l’audience est fait à la seconde près. La valeur de son point annuel est : 1 % d’audience national équivaut à 572 450 personnes âgées de 4 ans et plus.

[4] Bruno CHETAILLE, président de Médiamétrie, indiquait que « son métier se complexifie et, parmi les défis à relever, nous devons être en mesure de mesurer l’audience partout et par tous les moyens », revue Satellifax, n° 2744, 6 juillet 2007.

[5] Les trois opérateurs de téléphonies mobiles réunis au sein de l’AFMM (Association française du Multimédia Mobile) avait annoncé en février 2009 leur volonté de disposer d’un outil de mesure de l’audience mobile ne reposant pas sur un panel mais plutôt directement sur les données de connexion fournies par les opérateurs après avoir été rendue anonyme. Une phase de test devrait permettre de valider les méthodes de calculs avant d’être mise en œuvre et de fournir ses premiers résultats au cours du premier semestre 2010.

[6] Expway s’est allié avec Access pour proposer une solution de télévision sur mobile intégrant notamment l’interactivité et la distribution de fichiers multimédia prêts à utiliser, tels que ContentCast™, une solution de balado-diffusion étendue à la vidéo. Claude SEYRAT, vice-président marketing et stratégie d’Expway explique que « Médiamétrie était à la recherche d’un outil de mesure de l’audience, flexible et adapté, pour le secteur émergent de la télévision mobile, et nos solutions FastCollection répondent parfaitement à ces exigences », revue Satellimag, n° 109, 25 mai 2009, p. 29.

[7] Ivan DULGUERIAN, responsable Marketing Technologique et Services chez Médiamétrie, explique que « le recours à la carte SIM est pertinent car elle est embarquée dans tous les dispositifs de télévision mobile et communique directement avec le serveur de n’importe quel opérateur. Il permet d’exporter plus facilement les fichiers de détails d’audience en vue d’un traitement plus poussé par nos outils d’analyse ».

[8] Nous verrons à ce sujet, l’interview de Bruno CHETAILLE, Président-directeur général de Médiamétrie, revue Ecran Total, n° 764, 16 juillet 2009, p. 13.

[9] Ces résultats seront mis en rapprochement avec la mesure de l’Internet Médiamétrie et NetRatings, fondée sur un panel de 25 000 internautes.

[10] Dailymotion est l’une des premières plateformes vidéo au monde avec 40 millions de visiteurs uniques et un total de 922 millions de vidéo visionnées au mois de décembre 2008. Accessible depuis plusieurs pays, elle propose 18 déclinaisons de sa page d’accueil avec des contenus locaux distincts.

[11] Nous verrons à ce sujet, l’article « De nouveaux moteurs de recherche pour ratisser la vidéo », quotidien « Le Figaro », 18 août 2009.

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A propos Bertrand Minisclou

Chef de projet, ingénieur développement logiciel, chargé d'études en marketing et historien.
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